Le droit des successions est en perpétuelle évolution, notamment en raison des décisions de justice qui viennent préciser ou modifier les règles en vigueur. Ces dernières années, la jurisprudence a eu un impact significatif sur la pratique notariale et a modifié en profondeur certaines dispositions du Code civil relatives aux successions. Dans cette analyse, nous allons étudier l’impact de ces évolutions sur le droit des successions.
L’application de la réserve héréditaire
La réserve héréditaire est une disposition du Code civil qui protège les héritiers dits « réservataires », c’est-à-dire les descendants et, en l’absence de ceux-ci, les ascendants. Cette protection vise à garantir que ces héritiers ne soient pas déshérités au profit d’autres personnes. La Cour de cassation a rendu plusieurs arrêts importants concernant l’application de la réserve héréditaire, notamment en matière de donations entre époux et de legs particuliers.
Ainsi, dans un arrêt du 19 juin 2019 (n°18-21134), la Cour a jugé que les donations entre époux, même si elles sont réalisées avant le décès du donateur, doivent être rapportées à la masse successorale pour vérifier si la réserve héréditaire n’est pas atteinte. Cette décision vient modifier la manière dont les notaires doivent appréhender l’évaluation des biens donnés et leur prise en compte dans la répartition de la succession.
La donation-partage et le rapport des libéralités
La donation-partage est un acte par lequel une personne donne de son vivant des biens à ses héritiers, en prévision de sa succession. Cette pratique permet d’éviter les conflits entre héritiers au moment du règlement de la succession. La jurisprudence récente a apporté des précisions sur la manière dont les biens donnés doivent être rapportés à la succession.
Dans un arrêt du 4 juin 2014 (n°13-16206), la Cour de cassation a jugé que les biens donnés en avancement d’hoirie, c’est-à-dire en prévision de la succession, doivent être pris en compte pour déterminer si la réserve héréditaire a été respectée. En revanche, les biens donnés en donation-partage ne sont pas soumis à cette obligation de rapport, sauf si le donateur l’a expressément prévu dans l’acte.
L’indignité successorale
L’indignité successorale est une sanction civile qui prive un héritier de ses droits à la succession, lorsqu’il a commis une faute grave à l’égard du défunt. La jurisprudence récente a apporté des précisions sur les conditions dans lesquelles cette sanction peut être prononcée.
Ainsi, dans un arrêt du 18 septembre 2019 (n°18-50076), la Cour de cassation a jugé que l’indignité successorale peut être prononcée même si la faute grave commise par l’héritier n’a pas été sanctionnée pénalement. Cette décision vient rappeler l’autonomie du droit civil et du droit pénal, et permet aux notaires de mieux appréhender les situations dans lesquelles un héritier doit être exclu de la succession.
La réduction des libéralités
La réduction des libéralités est une mesure qui permet de ramener à la masse successorale les biens donnés ou légués en excès, afin de protéger la réserve héréditaire. La jurisprudence récente a apporté des précisions sur la manière dont cette réduction doit être calculée.
Dans un arrêt du 19 décembre 2018 (n°17-31304), la Cour de cassation a jugé que la valeur des biens donnés ou légués en excès doit être déterminée au jour de l’ouverture de la succession, et non au jour où les biens ont été donnés ou légués. Cette décision vient modifier le calcul de la réduction des libéralités, puisqu’elle prend en compte les variations de valeur des biens entre le moment où ils ont été donnés ou légués et l’ouverture de la succession.
Au regard de ces évolutions jurisprudentielles, il apparaît que le droit des successions est en constante mutation. Les notaires doivent ainsi se tenir informés des nouvelles décisions de justice afin d’adapter leur pratique et garantir une gestion optimale des successions.
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